Circulaire relative au suivi des foreign terrorist fighters

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Circulaire relative au suivi des foreign terrorist fighters

 

Question de M. Willy Demeyer au vice-premier ministre et ministre de la Sécurité et de l'Intérieur, chargé de la Régie des Bâtiments, sur "la circulaire relative à l'échange d'informations et au suivi des 'foreign terrorist fighters' en provenance de Belgique" (n° 7029)

 

08.01  Willy Demeyer (PS): Monsieur le ministre, une circulaire relative à l'échange d'informations et au suivi desforeign terrorist fighters (FTF) en provenance de Belgique a été diffusée le 21 août 2015 par les ministres de l'Intérieur et de la Justice.

Si je suis évidemment d'accord sur l'objectif de mieux lutter contre le terrorisme et le radicalisme, car l'heure n'est ni au laxisme ni aux demi-mesures, je m'interroge sur la solidité juridique de votre circulaire. Celle-ci pose les questions juridiques suivantes.

Premièrement, en ce qui concerne la base légale de la circulaire, l'article 62 de la loi sur la police intégrée dresse une liste limitative des missions d'intérêt fédéral pouvant faire l'objet de directives contraignantes de la part des ministres de l'Intérieur ou de la Justice. L'échange d'informations et le suivi de ces combattants relèvent-ils de ces missions? Si oui, pourquoi avoir rédigé une circulaire et non une directive contraignante? Si non, qu'en est-il de l'habilitation des ministres de l'Intérieur et de la Justice pour organiser une telle collecte d'informations et un tel suivi des FTF?

Deuxièmement, en ce qui concerne la composition de la cellule de sécurité intégrée locale que les bourgmestres doivent prendre l'initiative de créer pour assurer l'échange d'informations, aux termes de la circulaire, les services sociaux et les services de prévention sont-ils bien concernés, ainsi que les services locaux non policiers? En effet, il s'agit là d'un champ potentiellement infini: un CPAS, le pouvoir organisateur d'une école, un club de sport, une ASBL paracommunale, une bibliothèque, etc. Pouvez-vous clarifier ce point?

Enfin, troisièmement, en quoi un bourgmestre peut-il être considéré, sur la base de cette circulaire, comme habilité à donner à des services non policiers des informations générales et particulières sur des individus? Et, en retour, en quoi un bourgmestre peut-il être considéré, sur la base de la circulaire, comme habilité à contraindre des services non policiers de donner des informations générales et particulières sur des personnes?

Je rappelle qu'actuellement tous les policiers n'ont pas accès aux noms des djihadistes. Ici, il est question d'ouvrir cette information à un champ indéfini, voire infini, de personnes.

Concrètement, un bourgmestre a-t-il le droit de diffuser la liste en question au sein de la cellule de sécurité intégrée locale? A-t-on bien mesuré les conséquences de cette diffusion?

Par ailleurs, nous savons que certains types de services ont, dans leurs obligations légales en termes de manière de servir, le secret professionnel. La confiance et la sincérité sont des valeurs cardinales d'efficacité sur le terrain. C'est un des principes derrière lequel ces travailleurs et ces travailleuses sont susceptibles de se retrancher.

Selon moi, votre circulaire n'ayant pas de contenu normatif, pourrait-elle être invoquée en tant qu'habilitation législative permettant la communication de données couvertes par le secret professionnel? Quelle est donc la ligne à adopter si un service ou une personne refuse de collaborer? Un bourgmestre dispose-t-il d'un pouvoir de contrainte et si oui, en vertu de quelle disposition réglementaire?

Monsieur le ministre, il est nécessaire d'être prudent en la matière, car les travailleurs sociaux, de même que toute personne habilitée à traiter des informations relatives à des suspicions d'infractions (en l'espèce, les services de police et de renseignement), risqueraient de s'exposer aux sanctions réprimant la violation du secret professionnel.

Enfin, qu'en est-il de la responsabilité personnelle, pénale et civile des bourgmestres s'ils vont trop loin dans l'application de la recommandation ou s'ils ne posent pas les actes attendus?

08.02  Koen Geens, ministre: Monsieur le président, monsieur Demeyer, conformément à l'accord de gouvernement, la circulaire règle la gestion des informations relatives aux foreign terrorist fighters, la coopération entre les services et les différentes autorités ainsi que les modalités du suivi.

En d'autres mots, elle s'adresse à tous les partenaires dans la chaîne de la sécurité et ne porte pas uniquement sur les missions de la police intégrée. Les ministres de la Justice et de l'Intérieur exercent la tutelle sur les différents services concernés par la collecte d'informations et le suivi des foreign terrorist fighters. Une circulaire ministérielle commune était l'instrument adéquat pour régler les relations entre chacun des services.

L'optique de la circulaire est d'instaurer un climat de coopération constructif entre tous les acteurs. Elle incite, dès lors, les bourgmestres à créer une cellule de sécurité intégrée locale au sein de laquelle les autorités locales, la police, les services sociaux et les services de prévention affinent le suivi personnalisé des foreign terrorist fightersqui sont revenus.

Il ne s'agit toutefois pas d'une obligation, mais mon collègue Jan Jambon et moi-même sommes convaincus que c'est une nécessité.

À notre avis, la cellule de sécurité intégrée locale est un forum de coordination, de discussion et d'échanges d'informations. Ni la circulaire, ni la création de la cellule de sécurité intégrée locale n'ont pour objectif d'obliger les services sociaux à transmettre de l'information.

L'échange d'informations se fera dans le respect des missions et du cadre légal de chacun des acteurs. La composition de la cellule de sécurité intégrée locale peut être très diversifiée, avec des partenaires en matière de prévention divers. Il appartiendra au bourgmestre d'en juger.

En tant qu'autorité de police administrative, le bourgmestre recevra les informations dont il a besoin pour bien remplir sa mission. Une fiche d'information standardisée sera établie pour chaque foreign terrorist fighter à l'intention des autorités administratives. Ces fiches d'informations serviront de base pour la discussion au sein de la cellule de sécurité intégrée locale et aussi en dehors sur base du besoin de savoir. Il n'est donc pas question de fourniture de listes.

L'information permettra non seulement au bourgmestre mais aussi, par exemple, aux services de prévention d'avoir une vue plus large de la situation des foreign terrorist fighters afin de pouvoir assurer le meilleur suivi possible. Le but est purement de procurer suffisamment de renseignements afin que chaque service et chaque organisation puisse apporter sa contribution dans le cadre de le prescription normale des tâches.

08.03  Willy Demeyer (PS): Monsieur le président, je remercie M. le ministre pour sa réponse. Je me permettrai de la parcourir attentivement et de revenir sur le sujet de manière plus précise encore.

L'incident est clos.

Het incident is gesloten.

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