Salle de consommation à moindre risque pour usagers de drogues: bilan à 3 mois

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Vendredi 7 décembre 2018

Premier bilan positif pour la Salle de Consommation à Moindre Risque pour usagers de drogues. 

Ouverte le 5 septembre dernier, la Salle de consommation à moindre risque de la Ville de Liège « Såf ’ ti » est située rue Florimont, 22, à côté du Commissariat « Wallonie-Liège centre ». 

L’action de la Ville de Liège et de ses partenaires en matière de toxicomanie s’articule autour de 4 piliers :

  • La prévention
  • La réduction des risques
  • L’aide thérapeutique (les soins)
  • La lutte contre le trafic.

La Salle de consommation s’inscrit dans le pilier de la « Réduction des risques ». Ce projet vise 6 objectifs principaux qui répondent aux recommandations des experts en la matière et ont été validés par l’ensemble des acteurs de terrain et des autorités liégeoises :

1.  Atteindre autant que possible la population cible des usagers à haut risque, spécialement consommateurs réguliers et de longue date d’héroïne et/ou de cocaïne, principalement injecteurs ou qui l’ont été, consommateurs de rue marginalisés et échappant aux circuits de soins généraux ou spécialisés ;

2.  Procurer un environnement sain et sécurisé susceptible de diminuer les risques et d’améliorer les conditions d’hygiène de la consommation des drogues (objectif sanitaire immédiat) ;

3.  Réduire la morbidité et la mortalité associées à l’usage des drogues (objectif sanitaire intermédiaire) ;

4.  Stabiliser et améliorer l’état de santé des usagers (objectif sanitaire à long terme) ;

5.  Réduire l’usage des drogues dans l’espace public et les nuisances associées ;

6.  Prévenir la criminalité dans et aux abords des locaux de consommation.

Assurer la prise en charge sanitaire et sociale des usagers tout en diminuant les nuisances sur l’espace public

L’objectif de la Ville est que les toxicomanes qui consomment régulièrement sur l’espace public viennent quotidiennement dans cette structure et entrent ainsi en contact avec du personnel spécialisé. Cette accroche sociale journalière permet de les aider à améliorer leur condition physique et d’envisager des traitements de soins.

Tous les usagers fréquentant les lieux ont signé un Règlement d’ordre intérieur, ce qui permet d’établir un premier contact et de définir les règles en vigueur tant à l’intérieur qu’à l’extérieur du centre « Såf ’ ti ».

Chaque toxicomane qui vient à la salle, amène son produit et peut le consommer dans des locaux adaptés en fonction de son mode de consommation (local pour les injections, cabines pour les fumeurs...).

Ce passage régulier dans la salle de consommation est ainsi l'occasion pour l’usager de drogues d’entamer un travail de resocialisation et d’envisager une prise en charge.

Premier bilan après 3 mois d’ouverture :

Lors des études menées par les intervenants liégeois avant l’ouverture de la salle de consommation à moindre risque, quelques 300 personnes ont été répertoriées comme usagers fortement désinsérés et consommant régulièrement sur l’espace public. Le projet liégeois a dès lors été envisagé sur cette base.

A la date du 5 décembre, on peut considérer que le public cible est en voie d’être atteint puisque près de 72% de ces usagers (216) sont actuellement inscrits à la Salle. 

 

Le public est à 90% masculin, pour la majorité vivant en rue. La moyenne d’âge se situe entre 26 et 45 ans. Ces usagers consomment principalement de l’Héroïne, de la Cocaïne et du Speed Ball (mélange Cocaïne / Héroïne).

Pour l’héroïne, il y a autant d’injecteurs que d’inhalateurs, ce qui n’est pas le cas pour la Cocaïne, majoritairement consommée en injection.

Le type de produits consommés et leurs modes de consommation n’étant pas anodin, le travail de deuxième ligne est important ! La volonté de la Ville est que ce dispositif évolue progressivement afin de faciliter et d’amplifier les orientations thérapeutiques, les entretiens individuels, …Il y a à Liège un nombre important d’associations d’aide et de prise en charge. Un travail de réseau et de partenariat se construit avec ces différents opérateurs pour arriver à une prise en charge la plus complète possible de ces usagers.

Le passage à la SCMR (Salle de Consommation à Moindre Risque) est également l’occasion de proposer aux usagers des consultations médicales, des petits soins ou des conseils d’éducation à la santé.

L’antenne « Accueil Drogues » dépendant du Centre ALFA assure également une permanence dans les locaux, ce qui permet aux usagers d’avoir accès à un comptoir d’échange de seringues. Le fonctionnement de celui-ci est amplifié par l’ouverture de la Salle.

En effet, depuis sa mise en service le 5 septembre, on constate que le nombre de seringues récupérées est supérieur à celles échangées. Ce qui est une excellente chose en termes de sécurité publique.

Si l’ouverture de la Salle n’affecte pas le déroulement du travail policier, elle permet néanmoins aux agents qui assurent les missions de sécurité sur l’espace public d’orienter les usagers vers le centre « Såf ‘Ti ».

Au-delà des éducateurs de rue, les policiers de terrain représentent les professionnels les plus souvent au contact du public cible de ce projet.

Les agents de la Zone de Police de Liège ont été associés au développement du projet et ont une attention particulière à l’impact que l’ouverture de la Salle peut avoir dans le quartier.

Le contact avec les riverains sont au centre de leurs préoccupations et les plaintes ponctuelles sont analysées directement par le Comité de pilotage du projet (Cabinet du Bourgmestre – Gestionnaire de la Salle – Police).

Actuellement, les agents de terrain sont satisfaits de la procédure mise en œuvre et ne constatent pas d’impact négatif sur le quartier. En ce qui concerne les riverains, il n’y a pas eu de plaintes particulières.

Il faudra néanmoins être attentif durant l’hiver pour voir si certains usagers qui ne se rendent toujours pas à la Salle ne vont pas aller consommer dans des lieux chauffés (parkings, sas de banque,…).

Les usagers qui ne se rendent pas à la Salle, invoquent des raisons telles que la signature d’un Règlement d’ordre intérieur, le respect des règles, un personnel trop « curieux », …

La plage horaire qui est la plus fournie est celle de l’après-midi (12h30-16h30), avec une augmentation de la moyenne des passages par jour dans la salle qui a augmenté régulièrement au cours des 3 mois d’ouverture. En septembre, il y avait 20 passages/jour/moyenne, en octobre 35 et en novembre 39.

Depuis le 5 septembre, il y a eu 2.900 passages dans la salle. 

Le projet liégeois n’est pas isolé et fait l’objet d’un accompagnement scientifique.

La volonté de la Ville de Liège a toujours été de mener ce type de dossier en concertation et en s’appuyant sur les retours des expériences étrangères. En effet, il existe 91 salles de consommation dans 65 villes de 9 pays européens.

La Ville de Liège s’est inscrite dans le réseau européen « Solidify ». Lancé en 2018, ce projet européen SupervIsed Drug ConsumptIon Facilities (SolIDIFy) vise à accompagner les villes dans leur politique de réduction des risques et d’implantation de salles de consommation de drogue à moindre risque (SDMR). Objectif : concilier les enjeux de sécurité publique, la cohésion sociale et la protection des usagers.

Ce projet qui s’étendra jusque juin 2019 a pour objectif de mettre en place un réseau européen de villes disposant de salles de consommation à moindre risque. Il est développé en partenariat avec l’Observatoire européen des drogues et des toxicomanies basé à Lisbonne.

Dans ce cadre, le 3 avril prochain aura lieu au Parlement européen de Strasbourg un colloque dédié spécifiquement aux salles de consommation, à leur rôle et aux enseignements que l’on peut en tirer. Liège y sera bien entendu représentée.

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