Arcelor-Mittal: Proposition de Loi

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Mardi 29 janvier 2013

Sénat de Belgique
SESSION DE 2012-2013
Proposition de loi modifiant la loi du 13 février 1998 en vue de préserver l’activité économique et l’emploi dans le cadre de la fermeture d’une entreprise viable
(Déposée par Willy Demeyer, Hassan Bousetta et Philippe Mahoux)

DÉVELOPPEMENTS
Dans le contexte d’une financiarisation planétaire de l’économie, il est désormais courant que des entreprises bénéficiaires ferment certains sites et licencient des travailleurs dans le seul but d’accroître encore les marges bénéficiaires et la rémunération de leurs actionnaires.

Ainsi, en 2001, le groupe Danone annonça la suppression de 1.780 emplois dans le monde alors qu’il réalisait des bénéfices plantureux de plus de 130 millions d’euros.

De même, la société Michelin qui, en 1999, publiait des bénéfices semestriels de 20%, annonçait un plan de restructuration entraînant 7.500 suppressions d’emplois.

La Belgique n’est pas épargnée par le phénomène. Ainsi, en janvier 2010, un grand groupe industriel déclara sa volonté de licencier 10% de son personnel en Europe alors qu’il réalisait des bénéfices plantureux. Au final, 167 postes furent supprimés en Belgique (prépensions et départs volontaires) tandis que la multinationale distribua, pour l’exercice 2010, plus d’ 1,285 milliards d’euros à ses actionnaires.

En octobre 2011, le groupe ArcelorMittal annonça, quant à lui, la fermeture définitive de la phase à chaud à Liège et un licenciement de 581 travailleurs alors même que le centre financier du groupe sidérurgique ArcelorMittal Belgique générait un bénéfice de 1,394 milliards d’euros et maintenait l’octroi de généreux dividendes à ses actionnaires pour l’exercice 2010. Le 31 juillet 2012, la direction précisa que 795 postes seraient finalement supprimés.

Et, depuis lors, ArcelorMittal a annoncé le retrait d’un plan d’investissement de 138 millions € dans la phase à froid consécutive au blocage des négociations concernant la fermeture de la phase à chaud, susceptible de provoquer à terme le licenciement de 2000 personnes dans la sidérurgie liégoise. Ce 24 janvier 2013, ArcelorMittal a annoncé son intention de fermer 7 des 12 sites de la phase à froid, ce qui implique la suppression de plus de 1.300 emplois.

Pour les auteurs, il est indispensable que l'ensemble des responsables politiques et des forces vives unissent leurs forces pour permettre une reprise totale ou partielle des activités par un autre opérateur industriel. Actuellement, le droit belge assure à différents niveaux la protection des travailleurs en cas de fermeture d’une entreprise. La loi du 13 février 1998 – dite loi « renault » - précise notamment les modalités d’information et de concertation pour une procédure de licenciement collectif. Certaines conventions collectives – en particulier la convention n°24 en son article 6 et la convention n°9 en son article 11, régissent aussi les modalités d’information du conseil d’entreprise.

D’autres de ces conventions prévoient l'aide au reclassement des travailleurs licenciés (CCT 51 et 82) ou encore l’octroi de prépension (CCT 17). En ce qui concerne la continuité des entreprises, la loi du 31 janvier 2009 consacre un mécanisme de règlement judiciaire qui offre au débiteur la possibilité d’obtenir une suspension de l'exigibilité de ses dettes pour trois objectifs : - permettre la conclusion d’un accord amiable avec les créanciers ; - obtenir l’accord des créanciers sur un plan de réorganisation; - transférer à des tiers tout ou partie de l'entreprise ou ses activités, sous supervision judiciaire.

Cependant, actuellement, la loi ne permet pas de garantir la survie d’unités industrielles performantes et compétitives menacée en raison de la politique de groupes internationaux visant à préférer fermer un site viable plutôt que d’accepter de le céder à un repreneur. En France, des députés PS ont réagi à la suite de la fermeture de la papeterie d’Alizay appartenant au groupe finlandais MReal dans l’Eure, et de l’aciérie Mittal de Gandrange.

Ils ont déposé, le 28 février 2012, une proposition de loi tendant à garantir la poursuite de l’activité des établissements viables notamment lorsqu’ils sont laissés à l’abandon par leur exploitant.

Celle-ci prévoit, à certaines conditions, l’intervention du tribunal de commerce pour assurer la cession d’un site ou d’une activité à un repreneur potentiel lorsque les conséquences économiques, financières et sur l’emploi dans le bassin d’activité et la situation de l’entreprise le justifient.

Par ailleurs, la proposition vise à améliorer dans ce cadre l’information des travailleurs et à compléter notamment le droit d’alerte économique dont bénéficie le comité d’entreprise en droit français - qui lui permet actuellement d’informer les actionnaires de craintes quant à la gestion des mandataires sociaux - en créant un droit d’alerte complémentaire par saisine du tribunal de commerce en cas d’abandon manifeste d’un site.

Pour les auteurs, il est crucial de compléter en ce sens le droit belge. D’une part, la présente proposition modifie la loi du 13 février 1998 – dite loi « renault » en ajoutant un article 70 qui vise à préserver l’activité économique et l’emploi dans le cadre de la fermeture d’une entreprise viable. Celui-ci organise une procédure nouvelle en six temps :

1°) Lorsque les conséquences économiques, financières et sur l’emploi dans le bassin d’activité et la situation de l’entreprise ou de l’une de ses composantes le justifient, le président du tribunal de commerce procède à la nomination d'un mandataire chargé de la recherche d'offres de reprise du site ou de l’activité en lien avec l'entreprise cédante, dans les conditions déterminées par le Roi ;

2°) L'entreprise a l'obligation d'examiner de bonne foi l'ensemble des offres de reprise qui lui sont présentées ;

3°) Le conseil d'entreprise, les membres représentant le personnel au sein du conseil d'entreprise, les membres de la délégation syndicale et les travailleurs de l’entreprise, peuvent recourir à l’assistance d’un expert ad hoc pour apprécier la validité des offres de reprise. L’expert remet au mandataire désigné par le président du tribunal de commerce un rapport d'évaluation de ces offres ;

4°) Dans l’hypothèse où l’entreprise n’a donné suite à aucune offre de reprise, dans un délai déterminé par le Roi, le mandataire désigné par le président du tribunal de commerce peut être saisi par le conseil d’entreprise, les membres représentant le personnel au sein du conseil d'entreprise, les membres de la délégation syndicale et les travailleurs de l’entreprise, ou par tout candidat repreneur afin qu’il se prononce sur la pertinence des offres ;

5°) Le mandataire apprécie la pertinence des offres au regard de leur capacité à assurer le plus durablement l'emploi attaché à l'ensemble cédé et de l’adéquation de leur prix à la valeur économique de ce dernier. Il tient compte du rapport d'évaluation des offres effectué conformément au §3. Il invite l’entreprise cédante à accepter l’une des offres qu’il estime pertinente.

6°) Lorsque le mandataire a estimé qu’au moins une offre était pertinente et que l’entreprise refuse d’en accepter une, le tribunal de commerce peut, sur proposition de l’autorité publique compétente, prononcer la cession du site ou de l’activité dans les conditions définies par le Roi. D’autre part, la présente proposition modifie la loi du 13 février 1998 – dite loi « renault » en ajoutant un article 70 bis qui entend améliorer l’information des travailleurs dans le cadre de la procédure prévue par ce nouvel article 70.

Celui-ci se détaille en quatre points :

1°) Dans le cas prévu à l’article 70, le conseil d’entreprise, les membres représentant le personnel au sein du conseil d'entreprise, les membres de la délégation syndicale et les travailleurs de l’entreprise sont informés tout au long de la procédure des offres de reprise reçues par l’entreprise ;

2°) Lorsque la saisine, visée à l’article 70 §4 (point 4 susmentionné), précise que les faits apparaissent de nature à mettre en péril la pérennité de l’entreprise ou de l’une de ses composantes, la réponse motivée de l’employeur présente le projet d’entreprise garantissant la pérennité de l’exploitation de celui-ci ou précisant les conditions envisagées de sa cession ou de l’arrêt de son exploitation ;
3°) L’analyse du projet d’entreprise est inscrite de droit à la plus prochaine séance du conseil d’entreprise ;
4°) En l’absence de transmission dans ce délai du projet d’entreprise, le conseil d'entreprise, les membres représentant le personnel au sein du conseil d'entreprise, les membres de la délégation syndicale et les travailleurs de l’entreprise peuvent saisir le tribunal de commerce.

COMMENTAIRE DES ARTICLES
Art. 2
Cet article vise à modifier loi du 13 février 1998 portant des dispositions en faveur de l’Emploi, par l’ajout d’un nouvel article 70 destiné à préserver l’activité économique et l’emploi dans le cadre de la fermeture d’une entreprise viable.
Le §1er de ce nouvel article prévoit que lorsque les conséquences économiques, financières et sur l’emploi dans le bassin d’activité et la situation de l’entreprise ou de l’une de ses composantes le justifient, le président du tribunal de commerce procède à la nomination d'un mandataire chargé de la recherche d'offres de reprise du site ou de l’activité en lien avec l'entreprise cédante, dans les conditions déterminées par le Roi.

Le §2 de ce nouvel article précise que l'entreprise a l'obligation d'examiner de bonne foi l'ensemble des offres de reprise qui lui sont présentées.

Le §3 de ce nouvel article dispose que le conseil d'entreprise, les membres représentant le personnel au sein du conseil d'entreprise, les membres de la délégation syndicale et les travailleurs de l’entreprise, peuvent recourir à l’assistance d’un expert ad hoc pour apprécier la validité des offres de reprise. L’expert remet au mandataire désigné par le président du tribunal de commerce un rapport d'évaluation de ces offres.

Le §4 de ce nouvel article indique que dans l’hypothèse où l’entreprise n’a donné suite à aucune offre de reprise, dans un délai déterminé par le Roi, le mandataire désigné par le président du tribunal de commerce peut être saisi par le conseil d’entreprise, les membres représentant le personnel au sein du conseil d'entreprise, les membres de la délégation syndicale et les travailleurs de l’entreprise, ou par tout candidat repreneur afin qu’il se prononce sur la pertinence des offres.

Le §5 de ce nouvel article signale que le mandataire apprécie la pertinence des offres au regard de leur capacité à assurer le plus durablement l'emploi attaché à l'ensemble cédé et de l’adéquation de leur prix à la valeur économique de ce dernier. Il tient compte du rapport d'évaluation des offres effectué conformément au §3. Il invite l’entreprise cédante à accepter l’une des offres qu’il estime pertinente.

Le §6 de ce nouvel article affirme que lorsque le mandataire a estimé qu’au moins une offre était pertinente et que l’entreprise refuse d’en accepter une, le tribunal de commerce peut, sur proposition de l’autorité publique compétente, prononcer la cession du site ou de l’activité dans les conditions définies par le Roi.

Le §7 de ce nouvel article mentionne que les dispositions du présent article sont applicables aux entreprises dont le chiffre d’affaires dépasse un seuil défini par le Roi.

Art. 3 Cet article vise à modifier loi du 13 février 1998 portant des dispositions en faveur de l’Emploi, par l’ajout d’un nouvel article 70 bis qui vise à améliorer l’information des travailleurs dans le cadre de la procédure prévue par ce nouvel article 70.

Le §1er de ce nouvel article prévoit que dans le cas prévu à l’article 70, le conseil d’entreprise, les membres représentant le personnel au sein du conseil d'entreprise, les membres de la délégation syndicale et les travailleurs de l’entreprise sont informés tout au long de la procédure des offres de reprise reçues par l’entreprise. Le §2 de ce nouvel article précise que lorsque la saisine, visée à l’article 70 §4, précise que les faits apparaissent de nature à mettre en péril la pérennité de l’entreprise ou de l’une de ses composantes, la réponse motivée de l’employeur présente le projet d’entreprise garantissant la pérennité de l’exploitation de celui-ci ou précisant les conditions envisagées de sa cession ou de l’arrêt de son exploitation.Le §3 de ce nouvel article dispose que l’analyse du projet d’entreprise est inscrite de droit à la plus prochaine séance du conseil d’entreprise.
Le §4 de ce nouvel article indique qu’en l’absence de transmission dans ce délai du projet d’entreprise, le conseil d'entreprise, les membres représentant le personnel au sein du conseil d'entreprise, les membres de la délégation syndicale et les travailleurs de l’entreprise peuvent saisir le tribunal de commerce.
Le §5 de ce nouvel article mentionne que les dispositions du présent article sont applicables aux entreprises dont le chiffre d’affaires dépasse un seuil défini par le Roi.

Willy Demeyer
Hassan Bousetta
Philippe Mahoux

PROPOSITION DE LOI
Article 1
La présente loi règle une matière visée à l'article 78 de la Constitution.

Article 2 Dans la loi du 13 février 1998 portant des dispositions en faveur de l’Emploi, un nouvel article 70 est ajouté en ces termes :

« §1er. Lorsque les conséquences économiques, financières et sur l’emploi dans le bassin d’activité et la situation de l’entreprise ou de l’une de ses composantes le justifient, le président du tribunal de commerce procède à la nomination d'un mandataire chargé de la recherche d'offres de reprise du site ou de l’activité en lien avec l'entreprise cédante, dans les conditions déterminées par le Roi.

§2. L'entreprise a l'obligation d'examiner de bonne foi l'ensemble des offres de reprise qui lui sont présentées.

§3. Le conseil d'entreprise, les membres représentant le personnel au sein du conseil d'entreprise, les membres de la délégation syndicale et les travailleurs de l’entreprise, peuvent recourir à l’assistance d’un expert ad hoc pour apprécier la validité des offres de reprise. L’expert remet au mandataire désigné par le président du tribunal de commerce un rapport d'évaluation de ces offres.

§4. Dans l’hypothèse où l’entreprise n’a donné suite à aucune offre de reprise, dans un délai déterminé par le Roi, le mandataire désigné par le président du tribunal de commerce peut être saisi par le conseil d’entreprise, les membres représentant le personnel au sein du conseil d'entreprise, les membres de la délégation syndicale et les travailleurs de l’entreprise, ou par tout candidat repreneur afin qu’il se prononce sur la pertinence des offres.

§5. Le mandataire apprécie la pertinence des offres au regard de leur capacité à assurer le plus durablement l'emploi attaché à l'ensemble cédé et de l’adéquation de leur prix à la valeur économique de ce dernier. Il tient compte du rapport d'évaluation des offres effectué conformément au §3. Il invite l’entreprise cédante à accepter l’une des offres qu’il estime pertinente.

§6. Lorsque le mandataire a estimé qu’au moins une offre était pertinente et que l’entreprise refuse d’en accepter une, le tribunal de commerce peut, sur proposition de l’autorité publique compétente, prononcer la cession du site ou de l’activité dans les conditions définies par le Roi.

§7. Les dispositions du présent article sont applicables aux entreprises dont le chiffre d’affaires dépasse un seuil défini par le Roi. »

Article 3 Dans la loi du 13 février 1998 portant des dispositions en faveur de l’Emploi, un nouvel article 70 bis est ajouté en ces termes :

«§1. Dans le cas prévu à l’article 70, le conseil d’entreprise, les membres représentant le personnel au sein du conseil d'entreprise, les membres de la délégation syndicale et les travailleurs de l’entreprise sont informés tout au long de la procédure des offres de reprise reçues par l’entreprise.

§2. Lorsque la saisine, visée à l’article 70 §4, précise que les faits apparaissent de nature à mettre en péril la pérennité de l’entreprise ou de l’une de ses composantes, la réponse motivée de l’employeur présente le projet d’entreprise garantissant la pérennité de l’exploitation de celui-ci ou précisant les conditions envisagées de sa cession ou de l’arrêt de son exploitation.

§3. L’analyse du projet d’entreprise est inscrite de droit à la plus prochaine séance du conseil d’entreprise.

§4. En l’absence de transmission dans ce délai du projet d’entreprise, le conseil d'entreprise, les membres représentant le personnel au sein du conseil d'entreprise, les membres de la délégation syndicale et les travailleurs de l’entreprise peuvent saisir le tribunal de commerce.

§5. Les dispositions du présent article sont applicables aux entreprises dont le chiffre d’affaires dépasse un seuil défini par le Roi. »
Article 4
La présente loi entre en vigueur le jour de sa publication au Moniteur belge.

Willy Demeyer
Hassan Bousetta
Philippe Mahoux

Arcelor-Mittal

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