En matière de terrorisme, les villes doivent être aidées financièrement

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Mercredi 27 septembre 2017

Willy Demeyer, Maire de Liège : « Nous devons être aidés financièrement »

Le Figaro, Mer. 27 sep. 2017, Page 8

LE DÉPUTÉ MAIRE de Liège, président du Forum européen sur la sécurité urbaine (Efus) et membre de la commission d'enquête sur les attentats de Bruxelles, porte un regard aigu sur la lutte à mener contre le terrorisme.

LE FIGARO. - Que pensez-vous de villes comme Nice ou Paris qui prennent des dispositions, sur la promenade des Anglais ou à la tour Eiffel, pour sécuriser l'espace public ?

Willy DEMEYER. - Nous n'avons pas le choix. On attend de nous que nous tenions compte de ce qui s'est passé et adaptions l'espace public aux menaces. Si nous ne faisions rien, notre responsabilité pourrait être mise en cause. Le lendemain de l'attentat de Nice, j'ai organisé une réunion à Liège pour sécuriser les différents lieux qui présentaient une similitude avec la promenade des Anglais et qui étaient propices à un attentat au camion-bélier. C'est le cas du marché dominical, qui est un des plus grands d'Europe et qui se tient sur un quai, ou de la Foire aux variétés, la fête foraine qui se déroule chaque année sur un grand boulevard.

Comment avez-vous fait ? On a utilisé les camions des marchands et on les a mis en travers de la route. Mais la menace, elle aussi, évolue, le mode opératoire des terroristes s'adapte, c'est un combat permanent.

Sécuriser les villes a un coût. Êtes-vous favorable à un financement européen ?

Évidemment. Même si certains attentats ont touché aussi de petites villes en Europe, ce sont principalement les grandes qui sont visées. Nous devons être aidés, car si la pression budgétaire se fait trop forte sur les villes, il y a un moment où on pourrait être amenés à réduire le volume d'activités, et ce serait terrible car cela donnerait raison aux terroristes. Si nous ne pouvions pas sécuriser des événements culturels ou commerciaux, la tentation serait grande de les annuler. À Liège, cela fait plus de deux ans qu'on vit dans cette situation, avec une menace placée aujourd'hui au niveau 3, et nous avons atteint les limites de ce que nous pouvons endurer.

Vous êtes membre de la commission parlementaire sur les attentats du 22 mars 2016 à Bruxelles, qui doit formuler le mois prochain des recommandations destinées à être traduites dans la loi. Quelles sont-elles ?

Il y a un volet qui concerne l'architecture de la sécurité, notamment en matière de renseignement. Comment circule-t-il entre les différents services de police et de justice, comment circule-t-il dans le monde entre l'Europe et l'Amérique du Nord, comment assure-t-on le suivi des personnes repérées... Et il y a aussi une autre question essentielle, celle de la prévention de la radicalisation. Il faut rechercher l'épanouissement des personnes dans un projet qui soit, si possible, utile socialement. Le phénomène de la radicalisation ne touche pas que des gens profondément musulmans. On le voit dans les départs pour la Syrie, il n'y avait pas que des enfants de familles intégristes. C'est un phénomène qui touche les personnes qui ne trouvent pas leur place dans la société. Il faut beaucoup miser sur l'enseignement, la culture, le sport, pour emmener les adolescents sur un chemin positif, ou sinon ils vont en prendre un autre qui ne va pas nous plaire.

La déclaration qui doit être adoptée à Nice vous semble importante ? Oui, c'est très important que les villes s'investissent et qu'une coopération européenne se mette en place sur ce sujet. Le terroriste voyage en Europe comme un poisson dans l'eau et se joue des différences entre les régimes juridiques de nos pays. C'est pour cela que la coordination est importante, et le fait d'avoir, avec le Forum européen de la sécurité urbaine, un outil pour le faire est important également. L'avenir de l'Europe passe par la capacité des métropoles à se fédérer. La menace, elle aussi, évolue, le mode opératoire des terroristes s'adapte, c'est un combat permanent.

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